Le guide intergalactique pour devenir CTO

Dans le monde de la tech, on entend tout le temps parler de CTO (prononcez « si-ti-o »). Mais que se cache-t-il vraiment derrière cette fonction relativement nouvelle et qui ne possède pas encore de définition claire ? Si, comme bon nombre de développeurs, tu t’intéresses à ce métier prestigieux et souvent fortement rémunérateur (ça t’intéresse un job à 150K€ ?), cet article te donnera les clés pour comprendre les tenants et les aboutissants de ce job.

CTO est l’acronyme de Chief Technology Officer. En français, l’intitulé du poste est traduit par directeur.rice technique, directeur.rice technologique ou encore directeur.rice informatique. Graal à atteindre pour de nombreux lead dev, ce métier regroupe des casquettes à la fois techniques et managériales et possède un large périmètre d’action. En effet, le CTO a la charge du développement technique global d’une entreprise. Il veille donc à l’innovation technique de la boîte pour laquelle il travaille, à la gestion des projets informatiques mais aussi à la gestion des équipes techniques et au recrutement. Attention cependant, les responsabilités et les tâches allouées au CTO seront très différentes d’une structure à l’autre, que le CTO travaille pour une start-up ou dans une entreprise à maturité. Cela se vérifie notamment dans les témoignages de trois CTO qui ont bien voulu partager leur expérience du métier dans cet article.

Les prérequis

Les formations

Dans la grande majorité des cas, le CTO est issu d’une formation informatique ou technique. Il aura fait une école d’ingénieurs ou sera détenteur d’un titre universitaire (Doctorat, Master, DESS, DEA, Maîtrise…) en informatique. En tout cas, il doit connaître le secteur de la tech sur le bout des doigts. Avoir un background technique est une des conditions sine qua non pour prétendre devenir un bon CTO. Frédéric Arnoux, Bac+5 en informatique et ex-CTO chez iAdvize pendant 8 ans, a, de son côté, eu un cursus assez standard : « J’ai fait une école d’ingénieurs assez généraliste, qui dispensait des cours d’électronique, d’informatique, de réseau, de signal… Ce n’est qu’à la fin de mes études que je me suis spécialisé en informatique. » De son côté, Brieuc Tribouillet, CTO de Vite mon marché – entreprise de livraison de produits frais et locaux qui a cartonné durant la période de confinement – a commencé par faire un Master en Computer Science : Sup Info. « J’ai fait deux ans. Puis un an d’études à Jakarta sur les systèmes d’exploitation. J’ai travaillé au moins 6 ans en tant que lead dev ». Quant à Grégoire Ballot, jeune CTO du cabinet de recrutements de profils tech de haut niveau Bluecoders, a fait « des études de développement informatique à Epitech, une école vraiment spécialisée dans l’expertise informatique. »

L’expérience professionnelle

Pour être légitime, le CTO doit, en toute logique, avoir mis les mains dans le cambouis. Sinon, comment pourrait-il appréhender les problématiques des équipes qu’il manage ? C’est en effet ce qui ressort de l’expérience de Frédéric Arnoux qui estime cette dimension fondamentale : « De mon point de vue, il faut comprendre ce qu’est la tech. Je trouve que c’est un des premiers aspects pour comprendre ce que vivent ses équipes au quotidien. Ceci est particulièrement vrai dans la tech. C’est une des bases de ce métier. »

Se former au métier de CTO

Se former avec l’aide de son entreprise, s’auto-former ou encore se faire « mentorer » par des CTO expérimentés sont des passages obligés pour réussir dans le métier de CTO. Les CTO dont nous avons recueilli les propos s’accordent tous à dire qu’il est essentiel en effet d’en passer par là, qu’il ne faut pas avoir peur de se former. Car l’expertise technique d’un lead dev ne suffit pas à maîtriser les compétences requises pour une fonction comme celle-ci. « Se former est quelque chose que je recommande à quelqu’un qui a envie de se lancer dans le management mais qui n’y connait rien. » explique Frédéric Arnoux qui a bénéficié d’une formation individualisée par une personne externe à l’entreprise durant les 4-5 premiers mois de sa prise de poste. « On a fait une analyse de ma personnalité, j’ai eu des conseils sur la posture à avoir (…). Se former amène à avoir meilleure conscience de ce qu’on sait faire et moins bien faire. Et travailler à s’améliorer. » Pour sa part, Grégoire Ballot a choisi de piocher dans l’expertise des spécialistes et de s’inspirer de leur expérience. « Je me fais beaucoup mentorer par des CTO qui ont plus d’expériences que moi. »

Veille des concepts vs veille technologique

Avec de nouvelles responsabilités adviennent de nouveaux domaines d’expertise. Un CTO devra quasiment toujours abandonner sa veille technologique pour prendre de la hauteur. A terme, il déléguera cette expertise technique à un ou plusieurs membres de son équipe. « Plus l’entreprise grandit, plus il faut s’organiser pour déléguer l’expertise technique à quelqu’un d’autre. » explique Grégoire Ballot. Brieuc Tribouillet qui travaille en start-up reconnaît qu’il lui est difficile d’avoir le temps de faire sa veille. « Je vais le faire sur mon temps libre. Je vais me lever le matin et me programmer une heure de veille. Quand on est en start-up, on est sous l’eau, on fait au mieux et au plus vite. » Frédéric Arnoux a lui aussi vu sa veille s’amoindrir : « Mon énergie était placée ailleurs. Il faut faire ce petit deuil-là entre guillemets. Ce n’est plus nous en tant que CTO qui allons nous charger de la veille technologique. Il faut dédier quelqu’un à creuser une nouvelle techno. » Alors, bye bye veille technologique, mais bonjour veille des concepts. « La veille concernera plutôt des concepts qu’implémentent certaines technos plutôt que les technos en elles-mêmes » synthétise ce dernier.

 

Les responsabilités et missions

La gestion de l’innovation

Le CTO est un grand ordonnateur tech. En start-up, il doit faire le choix des technos, de la stack, des bibliothèques, de l’ERP… Dans une entreprise plus mature, il veillera à confier ces sujets à une équipe dédiée et à les superviser. Ceci dans un but précis : celui de répondre aux besoins d’un produit. Il doit donc veiller à faire coïncider l’innovation avec l’objectif business. « On a essayé de faire des choix pragmatiques par rapport aux compétences disponibles sur le marché. » explique Brieuc Tribouillet. « A la base, on est parti sur du low tech parce qu’il fallait aller très vite et montrer qu’il y avait un modèle économique. Aujourd’hui, nous nous occupons de faire une refonte complète qui sera mise en place dans quelques mois. Pour le coup, on va travailler sur des technos beaucoup plus scalables et robustes sur le futur ». Grégoire Ballot résume cette gestion de l’innovation ainsi : « Le CTO doit se poser la question de la cohérence du projet technique par rapport à la vision business avec un côté très transverse. »

Les interlocuteurs

La perspective d’avoir de nouvelles responsabilités professionnelles peut être exaltante, cependant il faut prendre en compte que les interlocuteurs d’un CTO sont des gens auxquels il n’a jamais eu affaire auparavant. Changer radicalement d’interlocuteurs sera probablement déroutant pour de nombreuses personnalités techs. Surtout si l’on y adjoint la nouveauté des sujets à prendre en charge. « En tant que CTO, on se retrouve assez rapidement à rendre des comptes au boss de la boîte. C’est très intéressant mais c’est un changement perturbant en soi et ce n’est pas toujours simple à gérer. » analyse Frédéric Arnoux. « D’un coup, on se retrouve aussi au comité de direction à discuter de problématiques qui paraissent très éloignées de la tech ! » Côté start-up, le CTO doit s’occuper des interlocuteurs externes : « Aujourd’hui, mes interlocuteurs sont les entreprises à qui l’on sous-traite, notamment pour le design de l’application. Je me suis chargé de discuter avec des agences, de les comparer, de faire des devis, de faire un benchmark des ERP… ce qu’un développeur ne ferait jamais ! » indique Brieuc Tribouillet.

Un rôle tampon

Peu importe la pression qu’il a sur ses épaules – et il en a ! –, le CTO doit garder la tête froide pour faire avancer de façon constructive ses équipes. Son rôle est donc notamment de faire comprendre à ses équipes techs les enjeux du projet sans pour autant communiquer son stress. Car cela viendrait interférer avec la concentration et l’immersion dont ont besoin les développeurs pour avancer sereinement sur le projet. « Un CTO se doit d’être une vraie zone tampon entre la pression business et les équipes techniques. » souligne Frédéric Arnoux. « Il faut arriver à prendre en compte la vision de l’entreprise, ses échéances financières, la friction client… et absorber la pression du board sans jamais la redonner telle quelle aux équipes de développement. » ajoute-t-il.

La logique produit

Le CTO n’est pas seulement le garant du bon fonctionnement d’un produit livré. Il doit aussi réfléchir en termes de rentabilité du projet, appréhender son produit avec une approche marketing de l’offre, avoir une culture du produit et du service forte, identifier les KPI du produit, étudier les bénéfices clients… Bref, il doit être un bon marketeur. « On ne fait pas juste de la tech pour un produit. On se rend compte que si le produit n’est pas vendu par les Sales, c’est un échec. » confie Frédéric Arnoux. « Il faut prendre en compte les problématiques business, financières, marketing, sales… Cela permet de donner un vrai sens à ce qu’on fait. »

 

Les compétences

La gestion d’équipe

Le CTO est l’élément moteur de l’équipe. Il doit veiller à ce que la motivation de ses troupes reste intacte tout au long du développement du produit pour que chacun se sente bien là où il est et donne le meilleur de lui-même. Frédéric Arnoux expose la gestion d’équipe en ces termes : « Le CTO doit faire en sorte de trouver des synergies, des gens qui fonctionnent bien ensemble. Il doit trouver les expériences qui se complètent bien dans une équipe. » Pour synthétiser, le CTO doit faire preuve d’un esprit d’équipe sans faille et d’un sens de l’organisation à toute épreuve. « Dans ce métier, il faut trouver un équilibre entre bien-être de chacun et performance de l’équipe au global. » avertit-il.

Le recrutement

L’implication du CTO dans le recrutement est capital et il ne faut pas négliger le temps que cela peut lui prendre. Nous venons de voir l’importance de la complémentarité des profils dans les équipes et le CTO doit en effet tendre vers ce but lors des différentes phases de recrutements. Faire passer des tests techniques ou non sera à la discrétion de chaque CTO, mais bien souvent celui-ci devra écouter son instinct et veiller absolument à ce que la personnalité du candidat soit en phase avec les valeurs de l’entreprise. « C’est le rôle du CTO de constituer l’équipe idéale. » concède Brieuc Tribouillet. « Peut-être est-ce un rôle qui peut être déléguer ultérieurement à la partie RH mais dans une start-up, il est important que ce soit le CTO qui gère ce poste. Il y a eu beaucoup d’instinct dans le recrutement car je recherchais vraiment un fit avec l’entreprise. » Pour Frédéric Arnoux, « il faut recruter des gens avec lesquels on se projette. (…) Même si c’est impossible de connaître quelqu’un en quelques heures, il faut, autant que faire se peut, être capable de sentir les choses notamment l’intérêt du candidat pour le produit. » Arnoux insiste également sur l’importance des soft skills des candidats : « Je ne creusais pas seulement les compétences techs mais aussi la sensibilité globale, le dynamisme, la personnalité. »

Le management

Le genre de management appliqué par un CTO découle souvent de sa personnalité mais aussi bien sûr de la taille de son entreprise et de ses équipes. Différentes méthodes se font donc jour. Cependant, une structure bien déterminée, qu’elle soit à dominante pyramidale ou collaborative, est nécessaire et souhaitable. Cette organisation sera vectrice de performances grâce à des process et des échanges clairs. Pour Grégoire Ballot, il faut « essayer de responsabiliser tout le monde pour démultiplier la puissance intellectuelle envoyée sur le projet. » Cette liberté doit toutefois entrer dans un cadre établi. « Il faut aussi s’assurer, en amont, de la garantie d’un alignement avec les valeurs et les missions de l’entreprise. » précise-t-il. Brieuc Tribouillet applique quant à lui « une méthode participative », plus efficace et rationnelle à mettre en place sur des plus petites structures. Frédéric Arnoux a, pour sa part, rencontré plusieurs méthodes de management dont certaines très verticales où des équipes de devs « followers » suivent des espèces de « gourou tech ». Loin de cette dernière organisation, sa méthode de management à lui penche aussi vers la responsabilisation des équipes « couplée à l’écoute. »

Pour progresser sur ce point, l’accélérateur de carrière peut être une aide précieuse pour dépasser ses propres blocages.

L’empathie

Selon tous les spécialistes, la clé pour réussir dans le métier de CTO reste et demeure de cultiver son empathie. « Il faut avoir de l’empathie envers son équipe. Pour moi, c’est la base. » indique Brieuc Tribouillet pour lequel il faut absolument faire preuve de ce sentiment si on veut être un bon manager. Pour Frédéric Arnoux, « structurer une équipe, c’est du management. » Et le management signifie « aimer les gens ». Grégoire Ballot insiste lui sur le fait que les compétences techniques ne seront d’aucune aide et que ce sont les compétences humaines du manager qui feront la différence : « Il faut être dans l’accompagnement de la personne qu’on manage. C’est très humain donc très délicat. Le côté technique à ce niveau-là n’a plus d’importance. Il faut être capable d’écoute, capable de réagir avec différents rituels. » Et d’ajouter qu’il « applique des temps managériaux bien définis et assez réfléchis qui ont pour objectif de garder tout le monde à bord du bateau et opérationnel. »

La communication

Le CTO est tenu d’être un bon communicant. S’il a bien communiqué, il aura tout gagné. Car ses équipes auront compris les enjeux du projet et s’impliqueront naturellement davantage. La communication se complexifiera bien sûr avec la taille des équipes. On ne communique pas de la même façon si l’on gère une équipe de deux développeurs en start-up ou si son équipe compte une bonne cinquantaine de personnes. « Plus l’équipe grossit, plus l’aspect communication devient un enjeu primordial. » déclare Frédéric Arnoux. Le CTO passe beaucoup de temps « à clarifier l’information, à la partager et à s’assurer qu’elle soit accessible aux personnes concernées. C’est très important qu’elle soit bien entendue et comprise par l’ensemble de l’équipe. » La pédagogie et la préparation sont, pour Grégoire Ballot, les maîtres-mots d’une bonne communication : « Il faut être bon vulgarisateur et bon pédagogue pour expliquer aux gens le sens de la mission, du projet. (…) La com, ça se prépare. Comme une soutenance par exemple ! » Des outils peuvent y aider d’ailleurs. « Il faut utiliser la communication proactive avec des présentations, des ateliers… quand on commence des projets dans la roadmap » rajoute-t-il.

Sur ce point aussi, l’accélérateur de carrière permet au travers de mieux comprendre le point de vue de chacun pour mieux s’y adapter.

CTO et CTO : Les dissemblances

Les start-up et petites structures

Scrum Master, designer UI/UX, tech lead, Product Owner, développeur… n’en jetez plus ! Le CTO d’une start-up cumule une multitude de casquettes. En témoigne Brieuc Tribouillet, CTO de la start-up Vite mon marché, qui avoue « entrer dans un nouveau stade du métier de CTO où [il est] en charge du rôle de PO, de Scrum Master, d’UX… Je fais aussi tous les choix techniques, l’architecture de l’appli… tout en continuant à coder. »

Les entreprises à maturité

Dans les entreprises de taille plus importante, le CTO doit faire une croix définitive sur l’opérationnel. Il n’a plus le temps de coder car il doit se consacrer pleinement au marketing, à la gestion de projet, au networking et au management. Frédéric Arnoux a constaté ces disparités de contours de poste. « Le rôle de CTO est complexe parce qu’en fonction des boîtes, le job peut être complètement différent. Celui qui fait la tech dans une entreprise où il y a trois personnes, eh bien… il est CTO ! Ce n’est pas du tout la même chose d’être CTO avec une équipe de plusieurs dizaines de personnes. » Dans les moyennes et grandes entreprises, le CTO devient un super coordinateur. Grégoire Ballot le précise ainsi : « Plus l’entreprise va grandir, plus son organisation va se complexifier et plus le CTO va jouer alors un vrai rôle de coordination entre la casquette technique et les autres casquettes à savoir marketing, commerciale… »

Le cas des licornes

Un développeur peut grandir professionnellement en même temps que l’entreprise dans laquelle il travaille. Une start-up au développement exponentiel donnera de belles opportunités d’évolutions professionnelles à ses salariés. Devenir CTO peut, dans ce cas, devenir la suite logique d’une carrière de développeur. Frédéric Arnoux a connu ce parcours chez iAdvize. « Dans une start-up qui grandit rapidement, les enjeux deviennent très concrets, très réels. Tout va très vite. Les équipes se structurent, les organisations sont bouleversées. » Arnoux a gravi les échelons. De développeur, il est passé lead dev grâce à la légitimité naturelle historique de connaître le projet depuis le début. « Puis j’ai choisi d’élargir ma palette en allant vers le management. » concède-t-il. Il est alors devenu Engineering Manager, puis VP Engineering et enfin CTO d’une équipe qui, à la fin, comptait 50 personnes.

La rémunération

Des chiffres qui font rêver

Il est temps maintenant d’aborder les choses sérieuses et de parler gros sous. En effet, la grille des salaires des CTO peut en faire rêver plus d’un. 30 000, 60 000, 90 000, 120 000€ annuels… : le salaire d’un CTO peut connaître de grandes disparités étant donné que ce barème est à mettre en perspective avec plusieurs critères. Le salaire variera essentiellement selon les compétences du salarié, son niveau d’expériences et enfin l’envergure du poste (taille de l’entreprise et de l’équipe à gérer).

L’envergure du poste

Comme pour beaucoup de secteurs, une start-up et un grand groupe n’accorderont pas les mêmes salaires et de façon très logique, plus l’équipe sera vaste et plus la rémunération du CTO sera importante. Les tendances de 2019, recueillies grâce à une étude du Think Tank Tech.Rocks et parues en septembre 2019, montre qu’un CTO d’une équipe de moins de dix personnes percevra en moyenne un salaire de 60 000€ par an. Chapeauter une équipe entre 10 et 30 personnes vaudra à son CTO un salaire moyen de 90 000€. De 30 à 80 personnes encadrées, la rémunération du CTO sera en moyenne de 97 000€ annuels. Enfin, sur de très grandes équipes, de 80 personnes et plus, les salaires moyens atteignent 150 000€/an.

L’expérience

CTO junior, expérimenté ou senior… Cela a une grande importance pour l’établissement du salaire. C’est même sans doute le premier critère que les RH prennent en compte. Toujours en observant les tendances 2019, on peut établir les fourchettes suivantes. Avec moins de 5 ans d’ancienneté, le CTO prétendra à un salaire moyen annuel de 54 000€. De 5 à 10 ans d’expériences, le CTO gagnera 75 000€ en moyenne et verra ses revenus augmenter de 5 400€ par année d’ancienneté. Au-delà de 15 ans d’expériences, on dépasse en moyenne les 120K€.

Les salaires H/F

Il est de notoriété publique que les femmes sont sous-représentées dans le secteur digital. Selon une étude du cabinet Global Contact, « Gender Scan 2019 », les femmes ne représentaient que 17% des effectifs dans le numérique français en 2018 alors qu’elles étaient 20% en 2009. Ce rapport indique donc que « l’implication des femmes dans l’industrie high-tech n’évolue plus ou commence à prendre du recul ». Cependant, l’optimisme est de mise côté salaire. Selon l’étude de Tech.Rocks sur les tendances 2019 des salaires des leaders de la tech, les femmes CTO – seul un petit échantillon a pu être interrogé malheureusement – gagnent davantage que les hommes au même poste : à ancienneté égale de plus de 15 ans d’expériences, leur rémunération est supérieure de près de 10%.

L’évolution de carrière

Capitaine d’un nouvel équipage

Dans le cas où le CTO se sent bien dans ses fonctions et qu’il y est compétent, il pourra bien sûr choisir de demeurer CTO. Celui-ci visera alors à encadrer une équipe plus importante dans la structure qui l’emploie. Ou bien il prendra la décision de se lancer un nouveau défi en changeant d’employeur. Il pourra ainsi se tourner vers une start-up où tout est à faire et où son expertise sera largement mise à contribution.

Directeur de l’innovation

Une suite logique à donner à sa carrière après avoir été CTO est de devenir directeur de l’innovation. Face aux besoins grandissants de compétitivité des entreprises, ce métier a pris en quelques années une place prépondérante dans les grandes entreprises et au sein des comités de direction. Le directeur de l’innovation vient le plus souvent d’une promotion en interne après des années d’expériences – généralement 15 à 20 ans –. Cette fonction, qui allie compétences techniques et soft skills stratégiques, offre des salaires allant de 130 000 à 160 000€ par an (sources revue Courrier Cadres – juin 2016). Son rôle majeur est de définir les grandes orientations de la politique de l’entreprise.

Directeur général

Autre alternative mais pas des moindres après une fonction de CTO, évoluer vers le poste de directeur général. Autrement dit devenir « Da Boss », calife à la place du calife. Nommé par les actionnaires et le conseil d’administration, le DG n’a pas forcément de parts dans la société qu’il dirige. Selon la fiche métier présentée sur le site guide-métiers.ma, il doit « définir la stratégie à mettre en œuvre, décider de l’allocation des ressources et de l’organisation qui lui permettront de mener à bien sa mission. »

Directeur des systèmes d’information

Dernière option – qui ne vaut toutefois que pour les entreprises non spécialisées tech – : passer directeur des systèmes d’information. Elle est l’une des possibilités d’évolution professionnelle pour un CTO. Un DSI a la charge de « définir et de mettre en place la politique informatique en accord avec la stratégie générale de l’entreprise et ses objectifs de performance » (source APEC). Le DSI, dont la rémunération s’échelonnera de 70 à 120K€ annuels, doit en somme « garantir la continuité du service informatique fourni aux utilisateurs et anticiper les changements (…) ».

CTO : l’accomplissement ou la désillusion

Trouver le manager qui est en soi

Un CTO doit apprendre à bien se connaître. Au fur et à mesure de son activité, il développera des compétences nouvelles et insoupçonnées. Brieuc Tribouillet témoigne en effet qu’il s’est « découvert à utiliser des capacités secondaires qu[‘il] ne connaissait pas forcément chez [lui] et qu[‘il] n’utilisai[t] pas dans le métier de développeur. » Chez Frédéric Arnoux, c’est la « capacité d’adaptation qui s’est fortement développée chez [lui]. » De son côté, Grégoire Ballot évoque « une proactivité et beaucoup de remise en question. » Pour lui, « les attentes étaient au rendez-vous. Les surprises [lui] ont apporté une vraie progression. »

Le deuil du code

Pour certains, l’abandon du code, de l’opérationnel… sera l’objet d’un lourd deuil. Passer CTO signifie effectivement repartir pratiquement de zéro. De plus, l’expérience de l’encadrement ne correspond pas à tous les profils. « J’ai fait le choix de me mettre en danger, d’aller vers un domaine qui me plaisait potentiellement mais qui était loin d’être celui sur lequel j’étais le plus à l’aise. » admet Frédéric Arnoux. On a vu que dans le cas des start-up, le CTO continuait davantage à coder que dans les grands groupes. En effet, Brieuc Tribouillet explique : « Je continue à coder 2-3 jours par semaine. Pendant la crise sanitaire, j’étais davantage à 1 jour de code. Je passe de plus en plus de temps sur les tâches de gestion de projets. » Grégoire Ballot a aussi fait la bascule. « Le jour où l’on passe manager, on redevient junior, débutant… C’est vraiment un métier à part entière ! Il y a toute une science derrière le métier de manager qui n’est pas moins large que la science de la tech au sens large. »

Un petit tour et puis s’en va

Le métier de CTO peut révéler pleinement le potentiel d’une personne. Pourtant, dans de rares cas, ce poste se révèle être très éloigné du graal fantasmé. Et que fait-on quand on se prend un mur ? Eh bien, on fait marche arrière. C’est ce qu’ont fait certains CTO qui, déçus des contours du poste, sont retournés à leurs premières amours : le code. Brieuc Tribouillet reconnait avoir « connu des CTO qui après cinq ans sont revenus à la technique pour se consacrer à nouveau au code. » Et d’admettre : « Je pense que j’y reviendrai forcément. »

 

 

D’aucuns s’accordent à dire que la seule façon de progresser dans une carrière tech est de passer par l’encadrement d’équipes. Ceci n’est pas toujours vrai et des études montrent que les développeurs ne souhaitent pas forcément devenir manager. Il y a d’autres alternatives en effet pour faire progresser son profil technique. Mais dans l’ensemble, ceux qui avaient décidé de sauter le pas, et qui sont devenus CTO, réussissent sur ce nouveau chemin. À la condition toutefois d’avoir accueilli avec curiosité et enthousiasme les changements que cela implique et de s’être formés au management. L’accompagnement s’avère ainsi nécessaire pour réussir et s’épanouir pleinement dans ses nouvelles fonctions de CTO. Se faire coacher ou s’autoformer apportent des bienfaits à ne pas négliger et c’est souvent la solution qu’ont choisie les CTO qui excellent aujourd’hui à leur poste.

Frédéric Arnoux | Linkedin : https://www.linkedin.com/in/farnoux/

Brieuc Tribouillet | Linkedin : https://www.linkedin.com/in/brieuc-tribouillet/

Grégoire Ballot | Linkedin : https://www.linkedin.com/in/gregoireballot/ | Twitter : https://twitter.com/gregoireballot

Découvrir l’accélérateur de carrière : https://artisandeveloppeur.fr/accelerateur-de-carriere/

Photo by Greg Rakozy on Unsplash

Auteur/autrice : Juliette Michaux

Rédactrice chevronnée après onze années comme journaliste en presse quotidienne print et web, je me passionne aujourd'hui pour le secteur du numérique. Outre une expertise en culture, cinéma, livres et bd, je possède des compétences sur les métiers de la tech grâce à une formation de développeur web et web mobile. Linkedin : https://www.linkedin.com/in/juliette-michaux-a36927100/ | Twitter : https://twitter.com/juliettemichaux

8 réflexions sur « Le guide intergalactique pour devenir CTO »

  1. Bravo pour cet article très complet !
    Je suis un developpeur junior rentrant tout juste sur le marché de l’emploi et c’est vrai que le role du CTO me paraissait un peu flou.
    Ce n’est plus le cas 😉
    Merci

  2. Très sympa à lire, ça pose bien l’ambiance. Pour être CTO depuis 1 mois dans une startup fraîchement lancée, je confirme le multi casquette. J’aurai bien aimé lire des interviews plus poussés de vos trois CTO.

  3. Bonjour
    très bon article qui met bien en avant la diversité du rôle de CTO selon les entreprises. Voici mon propre témoignage : des années comme développeur et chef de projet, puis manager tech, directeur de projet (plus du tout de code ni même de tech à ce stade), et au bout de plus de 20 ans de carrière, l’envie de revenir aux fondamentaux du code pour devenir CTO. Un passage d’une année à l’école 42 pour me remettre à niveau, un projet de startup qui m’a permis d’appliquer mes nouvelles connaissances (j’ai développé une app iOS et un backend en Python) et une embauche comme CTO dans une PME tech… où coder n’était plus d’actualité car j’avais bien trop de taf à manager, piloter, coacher l’équipe tech. Pas grave, ce qui importe, c’est de comprendre finement les problématiques de mon équipe pour faire les bons choix avec eux, c’est s’impliquer dans le Product Management pour définir et piloter la roadmap, c’est mettre en place les méthodes agiles et le devops… A côté de ça, c’est aussi continuer la veille techno en assistant à des Meetups et des conférences (surtout en ligne en ce moment…), et en lisant plein d’articles et bouquins sur de sujets tech ou de management. Une dernier élément qui n’apparait pas dans l’article : le rôle de CTO en tant que rôle de manager, est aussi bien plus exposé que celui de développeur. Apprendre en à rebondir est une compétence additionnelle du CTO !

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