Un gastronome dans un restaurant de quartier, par Jean Pasqualini

Cette histoire fait le parallèle entre la cuisine et l’informatique, je laisse votre imagination vous amener à la morale de l’histoire.

Nous allons suivre Michel, un cuisinier d’exception qui a travaillé dans les plus grands restos à Paris. Il décide de déménager en province et trouve un boulot dans un petit restaurant de quartier.

Ce restaurant propose du steak frite, le goût n’est pas exceptionnel, les frites sont parfois trop cuites, le steak classique et le tout est industriel. Autant dire qu’on peut faire la même chose chez soi très facilement pour meilleur goût.

Pourtant il marche bien et les clients reviennent car il n’est pas cher, près de la gare et le service est rapide.

Michel arrive dans ce restaurant en tant que cuisinier car il n’y a pas vraiment de restaurant gastronomique près de son nouveau domicile et il doit donc s’y faire.

Michel a ce réflexe humain de vouloir retrouver son environnement de prédilection quitte à bousculer la vie de ce restaurant bien que personne ne lui ait demandé.

Il ne comprend d’ailleurs pas pourquoi ses collègues cuisiniers se satisfont  de cet environnement qui le rend fou.

Il en parle à son chef, qui lui dit “Michel, ce n’est pas possible ce que tu nous proposes on ne peut peut pas et on ne sait pas le faire, cela demande du temps pour former nos cuisiniers et de l’argent pour acheter du matériel. En plus de tout cela notre commerce marche très bien et on risque de perdre nos clients en bousculant leurs habitudes, ils ne comprendraient pas pourquoi on augmente les prix et on met plus de temps pour leur fournir quelque chose qu’il n’ont pas demandé”

A partir de là michel se sentait frustré et ne comprenait pas pourquoi ces gens ne partageaient pas sa vision de la cuisine. Cette frustration il l’a vécue très mal et a eu envie de partir.

Il en discuta avec sa femme qui étant neutre et n’ayant travaillé dans aucun restaurant pris une posture d’écoute pour comprendre la situation.

Elle dit à michel: « Je comprend ce que tu souhaites mais je pense que tu vas trop vite, essaie de comprendre ce restaurant comme si tu y avais vécu pour avoir une vision qui ne soit pas que la tienne mais qui pourrait être partagée par tes collaborateurs. »

Le lendemain, lors du déjeuner avec l’équipe de façon tout à fait informelle il leur demanda pour quel raison il ne montrait pas d’attrait pour la grande cuisine.

Ceux-ci lui répondit que c’est parce qu’il n’en voyait pas l’intérêt car ils avaient toujours cuisiné de cette façon et que cela leur convenait.

Certains expliquaient regarder de temps à autre de grands cuisiniers à la télé mais que ce n’était pas applicable à leur restaurant de quartier. Ils voyaient cela comme quelque chose de réservé aux grands restaurants et que seul les grands cuisiniers sortis des grandes écoles de cuisine y travaillaient.

Il dit alors : « Et si au lieu de vouloir atteindre le summum de la cuisine on essayait juste d’améliorer notre recette avec une sauce maison pour le steak. »

Certain répondirent pourquoi pas mais que c’était risqué de changer la recette car on ne savait pas si les clients allaient l’apprécier.

Michel répondit alors qu’il suffirait de proposer lors de la commande notre nouvelle sauce maison afin que les curieux puissent l’essayer.

Tous n’étaient pas chauds mais ils avouèrent que l’idée n’est pas mal.

Michel proposa alors à ceux qui le souhaitent (les early adopters) d’aller voir le chef ensemble pour pousser la proposition.

Ils allèrent voir le chef qui accepta volontiers de prendre ce risque car il était mesuré et une communication eut lieu auprès de tout le monde pour officialiser cette action et ces porteurs. Ce seront les early adopter Jules (cuisinier), Vincent(serveur) et Michel (cuisinier) qui s’y essaieront et feront un retour sur leurs impressions.

Afin de mesure l’impact il proposa de suivre les ventes de steak frite avec sauce afin d’en mesurer l’impact.

Deux semaines plus tard, la réunion habituelle d’analyse des ventes eu lieux.

L’impact fut clairement positif.

La première semaine sur 1000 ventes, il y eut 500 ventes sans sauce et 500 ventes avec sauce,

La seconde semaine sur 1500 ventes, il y eu 250 ventes sans sauce et 1250 ventes avec sauce.

Non seulement les ventes ont progressé mais cela montre clairement que les nouveaux clients sont venus pour la sauce.

Il firent intervenir les early adopters :

Jules (cuisinier): J’apprécie vraiment cette sauce, je l’ai goûtée et j’ai rapidement appris à la faire. Je mets autant de temps qu’avant pour préparer les plats et pourtant je suis bien plus satisfait par la qualité de nos plats. Que du bonus.

Vincent (serveur): Au début seul quelques curieux ont essayé cette nouvelle sauce mais tous nous ont complimenté pour cette nouvelle saveur apportée à nos plats et au final maintenant presque tous me demandent automatiquement cette sauce au point de nous demander pourquoi on ne l’inclut pas de base.

Michel(cuisinier): Je suis très content du résultat, est-ce que cela vous donne envie de tous vous y mettre ?

Les cuisiniers : Oui !!!

Le chef: Eh bien c’est décidé, nous allons l’inclure à partir demaintenant dans notre recette.

Peu après Michel alla voir le chef pour proposer une nouvelle idée afin d’améliorer les frites en utilisant de l’huile parfumée.

Le chef devenu plus confiant grâce au succès de la sauce steak, proposa immédiatement d’organiser une réunion pour trouver des early adopter pour tester cela.

Ainsi par un cycle d’amélioration continu du restaurant, une réunion d’idée finit par être mise en place pour améliorer la dynamique et encourager tout le monde à en proposer.

Le restaurant finit par devenir populaire et des gens qui ne passaient pas par la gare venaient exprès pour manger dans ce restaurant reculé qui faisait parler de lui.

Non seulement cela, mais les gens revenaient régulièrement pour tester les nouvelles recettes présentes sur la carte.

Alors bien sur ce restaurant n’était pas devenu un des ces restaurants gastronomiques sur Paris mais il avait su garder son identité d’origine et construire sa propre réputation autour de ses recettes de base améliorées au fur à mesure du temps.

Michel y avait trouvé un nouveau plaisir différent de celui de ces restaux chics. Un plaisir qu’il avait construit avec ses collaborateurs et qu’il ne quitterait pour rien au monde.

Cet article est une contribution de Jean PASQUALINI. Si vous l’avez apprécié, vous pouvez le lui dire en commentaire ou directement sur son compte linkedin ! 🤗

Une réflexion sur « Un gastronome dans un restaurant de quartier, par Jean Pasqualini »

  1. Bonjour !

    J’ai découvert par hasard ce site et je le trouve bien sûr très instructif. Pour être honnête j’ai toujours trouvé (et je trouve toujours !) pompeux ce terme « d’artisan développeur ». A mon avis on est des développeurs comme il y a des musiciens ou des cuisiniers.
    On a le choix de le faire bien avec une envie constante de s’améliorer.

    Adorant cuisiné (et cuisinant autant que je développe haha), j’ai beaucoup aimé le parallèle. Le problème principal dans notre équipe actuel est bien « le changement ». Nous faisons de la pseudo agilité qui se transforme en chef qui distribue des tâches.
    Apporter des améliorations ou des suggestion relève toujours du parcours du combattant sans prétexte de manque de temps et de risques.

    Au plaisir

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